ODETTE. Mon dieu ! Toutes ces machines ! On dirait des libellules.
Je voudrais être comme celle-ci. Des longues jambes, des longs bras, un long cou, une démarche déhanchée.
PABLO. (montrant sa machine) Le V. R. M. S. Le vélo rameur marcheur skieur.
ODETTE. ça donne envie.
PABLO. Et comment ! (montrant les différentes parties de la machine) Mon premier pour les jambes.
ODETTE. Mes cuisses.
PABLO. Mon deuxième pour les fessiers.
ODETTE. Mes fesses.
PABLO. Mon troisième pour la poitrine.
ODETTE. Mes seins.
PABLO. Mon tout pour vous
ODETTE. Marilyn. C'est mon nom.
PABLO. Et comme vous le portez bien !
ODETTE. On se tutoie ?
PABLO. Le contraire me vexerait.
ODETTE. Tu es d'où en Espagne ?
PABLO. Andalousie. Mon père était gitan et ma mère castillane de grande noblesse. Il l'a enlevée et sur les rives du Guadalquivir ils m'ont fait. Et me voilà. Pablo.
ODETTE. Pablo de mon corps.
PABLO. Tes fesses, tes seins, tes cuisses sont des diamants que je vais tailler.
ODETTE. Tu es mon "toro". Noir. Brillant.
PABLO. Je frotte mon museau sur le cuir de ton cou. Mes pattes tremblent et mes sabots glissent sur l'herbe fraîche. J'aime ton odeur. Je la renifle.
ODETTE. J'adore la bosse sur ton cou. Ton corps s'élance en éventail du pompon noir de ta queue au diamant de tes cornes.
PABLO. Ma mante. Tu as tout de long. Tes pattes arrière et avant sont longues. Jamais elles ne s'arrêtent. Tes doigts comme les trois petits points de tes courbes. Tu as un corps infini.
Pablo disparaît.
ODETTE. Tu me prends sur ton dos ? Le train va arriver et je ne veux pas monter. Je ne veux pas monter ! J'ai horreur du train ! Emmène moi dans tes champs où le soleil brûle l'herbe, où l'ombre des arbres est si fraîche qu'il faudra me blottir dans le creux de tes flancs.