ODETTE. Tu te poses là comme mari !
ODILON. Je te l'ai dit. Je deviens une femme.
ODETTE. Et depuis quand ?
ODILON. Je ne peux pas dire. Ça va en grandissant.
ODETTE. Tu prends des hormones ?
ODILON. Pour qui tu me prends !
ODETTE. Va voir un psychiatre.
ODILON. Je me sens très bien.
ODETTE. Justement.
ODILON. (il chante.) Femme, je suis femme. Je le deviens, je l'ai toujours été, je le sentais, je l'étais. Primevères au printemps, mes seins poussent, mes hanches pointent, mes jambes, mes bras, mes yeux, mon cou, mes doigts s'allongent, mes cheveux soyeux !
ODETTE. Pouffiasse !
ODILON. Pense ce que tu veux. Je vais beaucoup mieux.
ODETTE. Bouge plus. T'es en train de te faire mater.
ODILON. Qui ?
ODETTE. Le gros.
ODILON. T'es dingue.
ODETTE. Maintenant que t'es une femme tu vas te faire mater.
ODILON. Pas par des dingues, j'espère.
ODETTE. Des dingues, des pas dingues, des moyens dingues, des hyper dingues. Comme aux halles. C'est l'arrivage, pas toi, qui choisit.
ODILON. Je voudrais que tu restes avec moi. Le temps que je me fasse à ma condition de femme.
ODETTE. Non. C'est fini Odilon.
ODILON. Pourquoi m'appelles-tu Odilon ?
ODETTE. Parce que tu n'es plus mon Odilon.
ODILON. Un peu. Le temps que je m'acclimate.
ODETTE. Non. T'es femme maintenant. Tu te débrouilles tout seul.
ODILON. Si tu devenais un homme je ne te laisserais pas tomber.
ODETTE. Devenir un homme ça n'a rien à voir. Et je reste une femme. Et je préfère les hommes.